Dans ce premier épisode du podcast Firt Moments soutenu par Obaïbi, Kim, Victoire, Sonia et Béatrice nous parlent de leur première nuit avec leur enfant, de leurs émotions, de leurs sensations, des pensées qui les ont traversées. De ce moment intime et bouleversant où l’on réalise qu’un petit être respire désormais à nos côtés.
Écoutez l'article en version podcast !
Et abonnez-vous ici depuis votre smartphone pour découvrir les autres épisodes de First Moments.
Partager ce dossier
LIRE L'INTERVIEW
Kim
Je m'appelle Kim, j'ai 41 ans, j'ai trois enfants. Et la première nuit dont je me souviens, c'est celle de mon fils aîné. C'était il y a quinze ans et pourtant, c'est encore assez prégnant, effectivement. Alors mon fils est né à 11 h du matin, donc j'ai eu le temps, j'ai eu une petite journée pour accueillir, avoir déjà du monde à la maternité. Et la première nuit, donc on est à l'hôpital. Donc l'équipe de nuit arrive et une infirmière puéricultrice vient me voir et me dit « O.K., on va prendre votre bébé. »
C'était il y a quinze ans, je crois que ça ne se passe plus comme ça. D'ailleurs, pour mes enfants suivants, ça ne s'est plus passé comme ça. Alors je lui dis : « Non, non, ce n'est pas possible. Je veux garder mon bébé avec moi. » Et là, elle a eu une attitude très… Alors ça tient beaucoup à l'humain, à cette personne-là, et voilà. Mais elle a eu une attitude très culpabilisante, où elle m'a dit : « Ah bon ? Vous le gardez ?
Vous savez, nous, on fait ça pour que vous vous reposiez. O.K., vous le gardez, mais vous ne m'appelez pas dans la nuit. S'il faut changer une couche, vous vous débrouillez. » Et là, en fait, j'ai eu une prise de conscience incroyable, c'est que je ne savais pas changer une couche. Je ne l'avais jamais fait. Je pense qu'on m'a aidée toute la journée, depuis 11 h du matin, à le faire. Je me suis dit : « Mais j'ai jamais fait ça ! » Et un peu par dépit, j'ai dit « O.K. »…
Ah oui ! Et donc là, elle m'a dit : « De toute votre manière, vous inquiétez pas, on vous le ramène pour téter à 3 h du matin. » O.K. Alors, un peu par dépit, j'ai dit : « Bon, O.K., prenez-le. » Et ils ont pris mon fils. Et moi, j'étais réveillée à 3 h pétantes, comme une horloge, parce qu'on m'a dit qu'on me le ramenait. Et on ne me l'a pas ramené de la nuit ! Et en fait, je n'ai pas osé…
Je ne sais pas, j'étais jeune, je ne savais pas, j'étais… Je me suis laissée un peu porter. Et je n'ai pas dormi de la nuit, cette première nuit, en attendant mon fils qu'on ne m'a pas ramené. Et à 7 heures du matin – 6 h et demie, 7 h –, l'équipe de jour arrive. « Est-ce que vous avez bien dormi ? » « Non, pas du tout, parce que j'attendais mon bébé. » Et on m'a dit : « Ah, mais c'est parce qu'il dormait très bien !
On vous l'a pas ramené parce qu'on n'a pas voulu le réveiller. » Sauf que moi, j'étais on fire depuis plusieurs heures déjà ! Et ça, c'était la première nuit. Et donc, bon, la journée se passe. Voilà. Et la deuxième nuit, là, je dis : « Non, ce n'est pas possible, on ne me prend pas mon bébé, je garde mon bébé avec moi. » Et ç’a été horrible ! Autant il avait dormi toute la première nuit, et j'aurais pu me reposer avec lui, sereinement, dans les bras ; autant la deuxième nuit, ç’a été des hurlements toute la nuit. Là, j'ai vraiment très, très vite appris – et à changer douze couches, et à bercer un bébé, et à marcher avec lui dans les bras, etc. Et voilà : ça, c'était la deuxième nuit, mais je n'ai pas profité de la première.
Alors autant vous dire que pour mes deux autres enfants, ça ne n'est pas du tout passé comme ça. Parce que j'étais informée, parce que j'étais aguerrie, parce que j'avais déjà eu un bébé avant, et parce que j'étais beaucoup, beaucoup plus forte dans mes convictions, en fait. Je savais ce que je voulais et il était hors de question qu'on m'impose quoi que ce soit. Mais ça, on ne le sait pas toujours au premier enfant. C'est-à-dire que si on le sent, si on se sent très en confiance avec l'équipe soignante et qu'on se dit « O.K., je vais laisser mon bébé et je vais me reposer, et lui va se reposer », c'est très bien. Moi, je n'étais pas comme ça. Je ne sais pas, j'étais bourrée d'hormones, j'étais peut-être plus inquiète qu'une autre. En tout cas, moi, ça ne m'a pas reposée du tout. Je pense que mon bébé a effectivement très bien dormi, et que ça ne l'a pas traumatisé. Mais en fait, je n'en sais rien. Parce que je pense qu'il y a quand même quelque chose qui se joue autour du lien, dans les toutes premières heures. Et voilà, et donc en fait, ça dépend vraiment de qui on est, de comment on le sent.
En fait, moi, ce que je conseille surtout et absolument, c'est « Faites-vous confiance vous-même, et ne vous laissez pas dicter des choses par d'autres. Vous êtes la maman, vous savez exactement ce que vous ressentez. » Et maintenant, c'est ça la grande responsabilité quand on a un enfant. C'est ça, c'est de prendre des décisions pour lui et pour soi, en accord avec soi-même. Et ça s'est joué sur cette première nuit, pour moi.
Sonia
Moi, je m'appelle Sonia. J'ai trois enfants. Donc j'ai mon premier qui a 4 ans, Souleimane, j'ai mon deuxième, Ismaël, qui a 2 ans et demi. J'ai un dernier enfant, donc Ihsan, qui a 4 mois. Évidemment, quand on parle des premières nuits, moi je pense tout de suite à la maternité, tout de suite après l'accouchement. Ce fut des premières nuits assez compliquées pour moi, parce que je découvre ce que c'est le rôle de maman. Je me souviens de mon premier, surtout, où j'étais dans une phase de découverte totale et j'avais des craintes, des peurs, j'avais beaucoup de choses qui se sont bousculées dans ma tête. Et du coup, j'avais aussi ce sentiment de… En fait, c'est un inconnu, on ne se connaît pas bien, encore. On ne se connaît pas. Même si effectivement, j'avais de l'amour pour ce bébé, j'étais complètement paniquée, les premières nuits. Et puis finalement, c'est à force de prendre le temps, de me faire confiance, aussi, que j'ai découvert que j'étais plutôt à l'aise dans ce rôle de maman.
Heureusement, je me suis entourée de personnes qui m'ont bien aidée. Notamment, je pense aux sages-femmes, aux différentes sages-femmes qui étaient disponibles, qui étaient vraiment… Elles ont décomplexé le truc, en fait. Elles m'ont dit : « Non mais ne vous inquiétez pas, on passe toutes par là. On a toutes vécu ces choses-là, ces moments de doute, ces moments où on se dit qu’on ne va pas y arriver. » Et puis bizarrement, quand on commence à accepter le rôle qu'on a, et à accepter… Comment dire ? On accepte finalement ce qui nous arrive.
Eh bien, le bébé se calme. Le bébé accepte d'être « sympa », entre guillemets, avec la maman. Bon, le bruit de fond, du coup, c'est l'allaitement qui est en cours. Après, avec mon deuxième, ç’a été aussi des moments, au début, d'angoisse parce qu’on a peur, en plus, que ce soit différent d'un enfant à un autre. Et puis, en fait, non, on prend le pli. Et vraiment, l'idée, c’est de se faire confiance, et surtout de s'entourer des bonnes personnes.
Victoire
Je m'appelle Victoire. J'ai 30 ans et je suis la maman de Céleste, qui vient tout juste de fêter ses 1 an. Ma première nuit avec Céleste, elle est un petit peu particulière – alors, j'imagine, comme toutes les premières nuits de mamans avec leur bébé. J'ai accouché juste après le déconfinement, donc j'avais passé plus de temps confinée que les autres Françaises, parce qu’on s’était déjà confinés avec mon mari, parce que j'étais enceinte et on savait pas très bien l’effet du Covid sur les femmes enceintes.
Donc ça faisait déjà quelques mois que j'étais collée, physiquement, à mon mari toute la journée, et quand j'ai accouché de Céleste, je me suis retrouvée, donc, décrochée de mon mari, mais avec un petit bébé de 3,6 kg, 53 cm, complètement collé à moi. J’ai dix neveux et nièces, ça, je pense que c'est important de le raconter, ils avaient de 2 à 15 ans. Donc je n'ai jamais été impressionnée par le tout petit bébé, minuscule, parce que j'en avais connu dix avant.
Je sais qu'il y a beaucoup de mamans qui, la première nuit, sont un peu perturbées par ce tout minus bébé qui est collé à elles, ce n'était pas quelque chose qui m'impressionnait. C'était quelque chose que je connaissais et que j'aimais d'autant plus parce que cette fois, c'était la mienne et c'était ma fille. Et je venais de découvrir que c'était une fille, parce que je n'avais pas demandé le sexe pendant toutema grossesse. Moi, j'avais une terreur,quand j'ai accouché, c'était d'avoir un bébé qui ne dort pas, parce que j'ai besoin de dormir au moins 8 à 9 heures par nuit.
Et il se trouve que j'ai accouché à 10 h du matin, à l'hôpital Lariboisière – super hôpital – et que je suis remonté dans ma chambre à 17 h. Donc toute seule, sans mon mari, avec Céleste. Et pour moi, je pense que la nuit, elle a dû commencer à 18 h 30 parce que j'étais très, très fatiguée. J'avais eu un travail de 30 heures. Et Céleste n'a pas dormi du tout ! Du tout, du tout !
Donc elle a passé la nuit à dormir sur moi. J'ai envoyé un texto à mon mari toutes les heures, en faisant le compte « Céleste, un ; Maman, zéro. Céleste, deux ; Maman, zéro. » Elle n'a pas dormi de la nuit. J'étais épuisée, et en même temps, j'étais dans un état complètement second. Parce qu'on était que toutes les deux, on était enfermées. Personne ne venait nous voir parce qu'on avait encore super peur du Covid à l'époque. Et j'ai passé cette nuit dans une fusion totale avec ma fille, complètement collée, à la regarder, à la découvrir. Évidemment, je trouvais que c'était le plus beau bébé du monde.
Alors quand je vois comme elle est belle aujourd'hui, je n'avais encore rien vu ! Je ne sais pas si j'avais encore beaucoup d'amour, à ce moment-là, mais je sais que j'avais un sentiment très, très fort de protection. Et je me disais qu'en fait, elle ne connaissait presque que moi, parce qu'elle connaissait mon odeur, elle connaissait les sons de ma voix, elle connaissait la manière dont je la berçais, la manière dont je marchais. Donc voilà, cette première nuit avec Céleste, c'est beaucoup de textos à mon mari pour partager ça aussi avec lui ; et puis c'est beaucoup de découvertes, beaucoup de protection et beaucoup, beaucoup de douceur. Et puis alors, ce qui est marrant, c'est qu'effectivement, elle n'a pas du tout dormi à la maternité. Et puis quand on est rentrées à la maison, c'est un bébé qui, au bout de deux semaines, a commencé à dormir 12 à 13 heures par nuit. Donc en fait, mes angoisses n’avaient pas tellement lieu d'être.
Béatrice
Bonjour, je m'appelle Béatrice. Je suis maman de quatre petites filles, qui ont entre 14 ans et 4 ans, et j'ai envie de partager avec vous le souvenir de ma première nuit avec Castille, qui est donc notre petite dernière. Quand Castille est née, on savait que c'était la dernière – de notre projet de famille, en tout cas. Et donc on a vécu les choses avec une intensité qui était probablement un peu différente. Je pensais que j'aborderais ça avec beaucoup de nostalgie, et en fait, pas du tout. J'étais complètement dans l'instant présent. Il se trouve qu'elle est née en plein mois de juillet à l'hôpital Foch, à Suresnes ; que ce jour-là, cette nuit-là, tous les bébés avaient décidé de venir au monde ; et que les équipes étaient complètement débordées.
Les chambres étaient toutes occupées. Et donc, au moment de monter dans une chambre, on nous a dit qu’en fait, non, on allait passer la nuit en salle de réveil, en attendant qu'une chambre se libère le lendemain matin. Donc on s'est retrouvées toutes les deux au milieu de plein d'autres mamans qui vivaient également leur première nuit avec leur bébé, et qui étaient dans la même situation. Et moi, j'ai ce souvenir d'une intimité incroyable avec ce petit bébé qui venait de naître, alors qu’autour de nous, il y avait du bruit, il y avait des bébés qui pleuraient, il y avait des mamans qui, parfois, téléphonaient ! Il y avait des mouvements de dingue, et moi, j'avais l'impression d'être seule au monde avec cette petite fille. Et j'ai savouré, finalement, chacune des sensations que cette situation m’apportait, en fait. Ils me l’ont laissée contre moi. Ils ont mis au-dessus de nous des couvertures chauffantes, et pendant cette première nuit, tout au long de cette première nuit, j'ai découvert son odeur ; j'ai découvert chaque partie de son corps, que je caressais ; j'ai commencé à découvrir sa voix, avec tous ces petits bruits, qu'on oublie et qu'on retrouve à la naissance d'un enfant. Et finalement, cette première nuit, qu'on n'a pas vécue dans l'intimité d'une chambre de maternité, on l'a vécue peut-être avec beaucoup plus d'intensité. Alors est-ce que c'était parce que c'était la dernière, et que je savais que je devais le vivre encore plus pleinement, ou est-ce que c'était la situation qui faisait ça ?
Toujours est-il que j'en garde un souvenir d'intimité incroyable. Et je me souviens de m'être dit : « Mais c'est quand même incroyable, c’est le quatrième petit bébé que je mets au monde, c'est ma quatrième fille – en plus, c’était une surprise. Chaque naissance de nos enfants a été une surprise, on ne savait pas si c’était une fille ou un garçon. Et là, c'était notre quatrième fille. Et je me disais : « C'est ma quatrième fille, et pourtant, tout est encore différent, et on redémarre complètement une nouvelle histoire. Et ce petit être, qui est contre moi, il est différent de chacune de ses sœurs. Et on va vivre une relation, elle et moi, qui va être encore complètement différente de celles que j'ai pu nourrir avec chacune de mes filles. Et je me suis dit que la vie était juste incroyable, et que c’était des cadeaux exceptionnels que de pouvoir vivre de telles émotions, et de telles joies, de tels bonheur. Voilà, mon souvenir de ma première nuit avec Castille.