Voici un témoignage qui donne envie de gravir les montagnes ! Maman de 3 enfants, dont Quentin, 12 ans, handicapé moteur, Blandine nous raconte sa passion pour le cyclotourisme en famille. Avec ce mode de transport, Quentin peut désormais pratiquer la même activité que ses frères, à leur côté, à la même vitesse. Et ça change tout ! Interview réalisée par Caroline Krauze, du site www.voyagefamily.com
Bonjour Blandine, peux-tu nous présenter ta famille ?
Après plusieurs années à la Réunion, nous vivons maintenant dans le sud de la France avec nos 3 enfants : Quentin (13 ans) qui a un handicap moteur de naissance - une infirmité motrice cérébrale sûrement liée à sa très grande prématurité - qui l’empêche de marcher correctement (il se déplace en fauteuil roulant), Baptiste (10 ans) et Matthieu (6 ans).
Comment vous est venue l’idée de voyager à vélo avec Quentin ?
Nous avons toujours été sportifs, et pendant très longtemps nous portions Quentin sur notre dos lors des randonnées en famille. Il a fait tous les sommets de l’île de la Réunion avec nous ! En grandissant, il est devenu un peu lourd pour nous et cela devenait compliqué moralement pour lui d’être toujours porté par ses parents. Nous lui avions acheté un tricycle : le projet de partir tous ensemble avec le même mode de transport a mûri doucement dans nos têtes.
Quelle a été votre première expérience ?
Nous avons commencé en 2014 par une semaine de randonnée à vélo sur le canal du Midi. Nous avions prévu que Quentin ferait 30 km par jour avec son tricycle, à son rythme, sur une route totalement plate. Mais, très vite, nous nous sommes rendu compte qu’il manquait de puissance musculaire pour un tel effort. Nous lui avons alors bricolé une solution de secours : Quentin pédalerait toujours sur son tricycle, mais ce dernier désormais attaché derrière le VTT de son papa.
Pour la première fois, les 3 enfants avaient la même activité sportive et pouvaient aller au même rythme. Ce fut une magnifique découverte ! L’organisation n’était cependant pas encore optimale : nous ne voulions pas que Quentin soit « derrière ». C’est comme ça que nous avons trouvé LE vélo qu’il nous fallait pour la suite de nos aventures : le tandem Pino Hase Bikes, qui permet d’avoir une personne à l’arrière (le papa, en l’occurrence) qui pédale, guide et freine, et une personne couchée à l’avant, qui pédale également.
Et les suivantes ?
Après le canal du Midi à vélo en famille en 2014, nous sommes partis en 2015 faire le tour de la Bretagne : 4 semaines pour parcourir 1 000 kilomètres, soit entre 40 et 50 km par jour. Bien équipés avec notre tandem, nous étions en complète autonomie, c’est-à-dire avec notre tente, notre réchaud et nos panneaux solaires dans nos sacoches !
En 2016, c’est en Suisse que nous sommes partis 3 semaines. Toujours en autonomie sur les 800 km de l’itinéraire. Je dois avouer que, sur le coup, j’ai été bien refroidie par le dénivelé des étapes… Le premier soir, j’ai même dit à mon mari que nous nous étions trompés, qu’il fallait abandonner. L’objectif de nos vacances à vélo en famille n’est pas du tout la performance physique. Heureusement, les itinéraires de cyclotourisme en Suisse sont extrêmement bien organisés : nous pouvions prendre le train sur les portions difficiles et, à partir de là, ce fut parfait !
Qu’est-ce que le cyclotourisme a changé pour votre famille dans son ensemble et pour Quentin en particulier ?
Lorsqu’on a un enfant en situation de handicap, on a peur qu’il « freine » la fratrie à cause de son handicap et que ses frères lui en veuillent inconsciemment par la suite. Les garçons se sont toujours bien entendus, mais grâce à ces semaines passées à pédaler côte à côte et à vivre 24 heures sur 24 en tribu, une nouvelle interaction s’est créée entre eux.
Pour Quentin, tous ces kilomètres parcourus en vélo ont contribué à lui donner confiance en lui. Il s’est rendu compte qu’il pouvait faire comme tout le monde, et même beaucoup plus ! Par ailleurs, le fait d’être sur un tandem et de devoir s’en remettre entièrement à son père pour la conduite, le freinage, la vitesse, l’a obligé à lâcher prise, à faire confiance aux autres. Ce n’était pas gagné car, ne maîtrisant pas son environnement, Quentin et les enfants handicapés moteur comme lui sont au départ plus craintifs.
Pourriez-vous revenir en arrière et changer de moyen de transport pour voyager ?
On a parfois des envies de roadtrip en camping-car. Mais on a maintenant bien trop peur d’être « enfermés » ! Le vélo rend tellement heureux. Avoir la tête toujours dehors, le vent dans les cheveux… Cela procure un sentiment de liberté dont on peut difficilement se passer.
Conseillerais-tu le cyclotourisme aux parents d’enfants handicapés comme Quentin ?
Oui ! Nous rencontrons beaucoup de parents qui se sentent enfermés avec leur enfant handicapé. Avec notre expérience réussie, je veux montrer à tous que l’on peut lever les barrières, sortir de la douleur, du repli sur soi. Le week-end prochain, deux familles viennent à la maison essayer notre tandem avec leur enfant handicapé. C’est une petite victoire. Et notre nouveau cheval de bataille…
Quels sont vos prochains projets ?
Cet été, direction l’Est, le long du Danube : 1 200 km, et 5 semaines dans 5 pays différents (Autriche, Hongrie, Slovaquie, Croatie et Serbie) ! Notre rêve ultime serait de partir faire le tour du monde en famille à vélo. Rien n’est impossible, alors pourquoi pas…
La suite des aventures…
Suivez toutes les aventures de notre joyeuse famille sur leur blog « 3 ti gars à roulettes ».
Sur son site « Voyage Family », Caroline Krauze, maman aventurière de 36 ans, interviewe des familles inspirées et inspirantes, sélectionne des hébergements insolites et propose des destinations dans le monde entier à partager avec ses enfants. Pour organiser vos vacances cet été, guettez son livre 50 destinations de rêve pour s’évader en famille, à paraître ce mois-ci !
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